« Les amours passent, les amitiés restent », dit l’adage. Mais que ce passe-t-il quand les amitiés ne restent pas?

Que ce soit par trahison, par embrouille ou simplement parce que la vie nous amène sur des chemins différents, un jour ou l’autre, on perd tous des amis. Certaines coupures sont plus brusques, plus douloureuses que d’autres. C’est ce que j’appelle la peine d’amitié.

La peine d’amitié? La peine d’amour, je veux bien. Personne ne remet en question la douleur d’une peine d’amour. On a tous déjà vécu une peine d’amour. Combien de livres, de film, de chansons ont été écrit.e.s sur la peine d’amour? On ne les compte plus!

Mais la peine d’amitié, elle?

Silence. Ignorance ou tabou? Je ne sais pas. Ce que je sais toutefois c’est que la peine d’amitié fait mal aussi. Et qu’elle ne reçoit pas la visibilité qui lui est due.

J’ai perdu des ami.e.s pour différentes raisons. Chaque fois, la rupture a été accompagnée d’une grande douleur. Chaque fois, elle a duré longtemps. De réminiscences de moments partagés à projections de moments à venir, les pensées reviennent à cette amitié perdue. « Elle aurait tellement aimé cette journée », « Qu’est-ce qu’il dirait de me voir ici?! » L’ami.e me suit en pensé pendant un bon moment; plus l’ami.e en question était proche, plus la rupture prend du temps.

Il faut du temps pour s’habituer à un tel changement dans notre environnement – de la présence à l’absence. Comme en amour. La peine d’amour est plus intense, certes, l’absence se faisant sentir dans tous les aspects du quotidien. La peine d’amitié, elle, s’étire.

Vers qui on se tourne quand on perd un.e. ami.e? Dans la peine d’amour, nos ami.e.s accourent pour nous soutenir dans l’épreuve. Mais voilà, dans la peine d’amitié, c’est justement ce réseau de soutien qui est brisé. Certes, nous avons généralement plus d’un.e ami.e, mais ils sont souvent établis en réseau. Quand on perd une amitié, on risque d’en perdre d’autres, par loyauté, par choix, par effritement des occasions de réunion, etc. On doit aussi renoncer à toutes ces relations qui étaient davantage des « amis d’amis » que des amis propres, ces personnes qu’on affectionne et qu’on ne reverra pas.

De plus, contrairement à la peine d’amour qui est reconnue de tous, la peine d’amitié est minimisée, voire ignorée. Rien de pire, quand on se sent démolie, que de ne pas se sentir entendue en plus.

Parce que, oui, je me sens démolie. Chaque fois. Même quand c’est moi qui initie la rupture.

Parce que je le fais par nécessité, pas par plaisir. Se couper d’une personne qu’on aime, même lorsque c’est pour se protéger, c’est douloureux.

Se protéger d’une amitié trop énergivore. Se protéger des déceptions. Se protéger des ami.e.s utilisateurs.

Dans la dernière année et demie particulièrement, une dépression m’a obligé à reconnaître et accepter ma vulnérabilité. Et j’ai dû apprendre à me protéger. J’ai dû rompre ou constater des ruptures des amitiés. Dans un état de grande vulnérabilité, j’ai dû me mettre dans des situations difficiles. Et je me suis sentie démolie plus d’une fois.

Par chance, j’ai d’autres amitiés extraordinaires. Je me suis tout de même retenue de m’épancher sur mes peines d’amitié, par crainte de ne pas être entendue ou de ne pas être pleinement comprise. Aussi, parce qu’il est encore difficile pour moi d’aborder ces fractures. La plaie émotive n’est pas tout à fait guérie.

Par chance, le temps apaise les blessures.

Ce que je veux dire, c’est que la peine d’amitié existe. Qu’elle fait mal, très mal. Qu’il ne faut pas la sous-estimer.

Je vous souhaite de faire preuve de compassion envers vous-même – et envers vos ami.e.s – lorsque vous traversez une peine d’amitié.

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